Baigné par un E3 qui annonce un futur étincelant et piégé à nouveau par les soldes Steam, je me suis lancé dans deux aventures en parallèle Remember Me et Batman Arkham City. Puisque tout a déjà été dit sur le second c'est bien du poupon de Dont-Nod dont je compte vous parler.
Vous incarnez Nilin, une jeune femme acrobate et chasseuse de souvenirs à ses heures perdues, plongée dans une société chaotique en plein cœur de Paris en 2084 (Neo-Paris). Autant vous le dire tout de suite, Delanoë s'est vraiment donné du mal, créant un environnement assez incroyable partagé entre les bidonvilles vraiment glauques et les quartiers plus bourgeois qui brillent de sobriété et de bon goût. Plus de classe moyenne les amis, les hausses d'impôts successives ont sans doute eu raison de nous. Ou peut-être est-ce le nouveau mode de vie qui a fini de creuser l'écart social. Car dans cet avenir, pas si lointain, tout est basé sur la numérisation et le contrôle des souvenirs, la possibilité d'oublier ses malheurs ou pire, de les voir remaniés, pour peu que vous passiez entre les mains expertes de notre héroïne.
Bien avant qu'elle se fasse prendre, Nilin et quelques uns de ses amis formaient un groupe rebelle : l'organisation erroriste, et n'hésitaient pas à modifier allègrement les souvenirs des pontes du système... Jusqu'au drame, le souvenir un peu trop altéré, la boulette. Arrêtée puis incarcérée, Nilin est sur le point de voir sa mémoire totalement effacée, lorsque vous décidez d'intervenir. Quel esprit chevaleresque !
Après une évasion des plus... simples, de la prison de « haute sécurité » de la Bastille, vous baladez la jeune femme de la bute Montmartre aux quais de Seine, cherchant désespérément ses souvenirs perdus, guidé par les directives que vous laisse le chef de la rébellion erroriste : Edge. Bien qu'elle puisse être bucolique par moment, votre promenade linéaire... très linéaire, puisqu'un seul chemin n'est disponible à la fois (et tenez vous bien, il est fléché), vous conduit parfois à des aires de jeux un peu plus grande qu'un couloir. Chouette ! Vous allez enfin pouvoir profiter de la toute puissance des jambes athlétiques de Nilin. Et bien non ! Dans le monde de Remember Me, aire de jeu signifie arène de combat, et vous vous retrouvez dans un classique couloir-arène-couloir, que même Stéphane Plaza ne saurait vendre à un prix décent. C'est vraiment frustrant tant l'environnement semble être le deuxième acteur du jeu et que se balader librement dans un Néo-Paris, à l'instar d'un Assassin Creed, aurait vraiment été jouissif. Dommage !
Dommage car une bonne partie de l'aventure aurait pu être de l'exploration mais se trouve être finalement une suite de combats asthmatiques avec cinq types d'ennemis différents et des combos que vous créez vous-même dans la limite des quatre combos disponibles. Nous sommes d'accord, quatre combos toujours basé sur les mêmes schémas, c'est pas la folie à Walibi, mais bon... Le système aurait pu être sympathique si il avait offert un minimum de liberté. J'avoue aussi que j'ai le dynamisme des combats fous de Batman en tête et que ça dessert grandement Remember Me. Encore une fois : Dommage !
De temps à autre, au détour d'un couloir ou d'une... arène ― c'est bien, vous suivez ― se lance une séquence de jeu des plus intéressantes, le piratage de souvenirs. Vous vivez dans un premier temps le souvenir de votre cible dans son intégralité puis pouvez le remonter voire l'altérer. En agissant sur l'environnement du souvenir, vous arrivez à le changer et donc à corrompre le présent de votre cible ― après tout, notre personne n'est que le fruit de nos souvenirs. Le principe est assez brillant et la jouabilité, excellente à la manette. On peut cependant regretter d'avoir un objectif défini et inaltérable. Vos choix impactent la fin de la séquence mais pas au delà. Si vous n'empruntez pas l'unique chemin attendu par le script, vous avez le droit de recommencer. Au final, ce qui aurait pu être une idée révolutionnaire a autant d'intérêt scénaristique qu'une simple vidéo. Je vous laisse déduire le « Dommage ! », j'en ai assez de le dire.
Reste enfin l'histoire qui, une fois de plus m'a déçu. Les petits français de Dont-Nod ont créé un cadre unique et profond, je ne parle même pas de la direction artistique qui m'a soufflé, mais bel environnement ne signifie pas forcément histoire prenante. Si les scénaristes ont évités le manichéisme bateau par quelques introspections balourdes de notre héroïne, reste que les personnages sont creux au possible. Ainsi le changement d'une infime décision dans un souvenir fait reculer chacun des grands méchants avec des remises en question telles que : « J'ai fait le con, on arrête tout ». Beaucoup trop facile à mon goût. On ne peut pas dire non plus que les twists scénaristiques soient de réelles surprises tant ils auraient pu être dans un film de Tom Cruise. Désolé, je suis dur mais quand même.
J'ai testé pour vous Remember Me, et vous l'aurez compris, la polémique qui prend place sur la toile, existe aussi en moi. Les premières minutes de jeu sont tellement riches et bluffantes, à l'image de certains panoramas qui parsèment l'aventure, qu'on ne peut qu'être déçu devant tout ce qui suit tant le potentiel semblait immense. Si ces dix heures de jeu sont correctes sans plus, je crève d'envie de savoir ce que donnerait une suite bien plus ambitieuse. Au final peut-être aurait-ils dû appeler leur titre Remind of Me... quand le deux sortira.